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Nathalie Hug & Jérôme Camut

Ils se rencontrent en 2004 et depuis ils consacrent leur vie à l'écriture à quatre mains avec plus de treize romans comme Les éveillés, Nos âmes au diable ou les sagas best-sellers comme Les voies de l'ombre et W3. Les Camhug ont obtenu le Prix Ouest avec Islanova mais aussi le Grand Prix du Festival Sans Nom avec Et le mal viendra et Nos âmes au Diable.

Et en plus d'être écrivains ils sont scénaristes !


Quartier Noir : Bonjour Jérôme et Nathalie, est-ce que pour commencer, vous pourriez vous présenter pour ceux qui ne vous connaîtrait pas encore ?

Jérôme Camut & Nathalie Hug : Ah non ! On ne va pas commencer l'interview comme ça ! (rires) Qui ne nous connaît pas encore, dans votre groupe ?

QN : Je crois qu'Alex ne vous connaît pas encore.

NH : Bien, alors comment peut-on se présenter à Alex?

JC : On a 107 ans à deux. Normalement, ça force un peu le respect. Visiblement, là, non. (rires). Plus sérieusement, on est un peu une singularité du paysage littéraire parce qu'on est un couple, un écrivain à deux têtes, et on a un style particulier à deux. Chacun de nous à son style propre de son côté qui se complète quand on écrit à deux. On peut donc dire qu'on est une sorte d'OVNI littéraire. On a écrit quinze romans, et là, on est sur le seizième. Nathalie en a écrit quatre de son côté, j'en ai écrit quatre du mien. Elle travaille sur son cinquième et moi, j'envisage de m'y mettre.


QN : Que du thriller ou vous explorez d'autres styles?

NH : On écrit ce qu'on a envie d'écrire au moment où on veut raconter notre histoire. C'est-à -dire qu'on a commencé avec du polar dans Les voies de l'ombre, puis du roman d'aventures. Les éveillés va aller du côté thriller fantastique, Les murs de sang, c'est du thriller et Islanova, du roman d'aventures avec une thématique climatique. Je n'aime pas dire écologique, mais c'est pourtant un roman qui parle du radicalisme écologique. Et W3, on peut dire que c'est notre millenium. Voilà concernant l'identité Camhug. De son côté, Jérôme seul écrit du fantastique et du mien, j'écris de la littérature historique, générale ou de la romance. Quand on invente une histoire, on ne la commence pas en se disant qu'on va rentrer dans une case en particulier. Les lecteurs qui nous suivent depuis le début et qui ont tout lu sont, par la force des choses, des lecteurs curieux qui aiment être surpris, qui savent qu'ils ne liront jamais la même chose, qui ne seront pas déstabilisés si on décide de mettre une pointe de fantastique. Pareil quand on décide de ne pas suivre une enquête de police, ou de parler d'écologie. On parle vraiment de ce dont on veut parler. On n’a pas une politique de carrière sur des rails que nous imposerait un éditeur. Par exemple, si on a un livre qui a très bien marché, on ne nous imposera pas de refaire un livre dans le même style, sur la même thématique.


Alex : Vous faites vraiment ce que vous avez envie. Et vous avez souvent les mêmes envies en même temps?

JC : Non mais on s'arrange. Le processus de création de l'idée est impossible à décrire. C'est comme vous, quand vous avez une idée, vous l'avez seul. Nous, c'est pareil. On est seul et quand l'un de nous a une idée, on en discute et si elle est bonne, on saute dessus parce que, les bonnes idées, ça ne court pas les rues.

NH : Il dit ça, mais il faut savoir que Jérôme a un cahier à idées rempli.

JC : Oui, mais dont la plupart ne deviendront jamais des romans.

NH : On avait dit que tu ne me contredirais pas ! (rires). Est ce qu'on a répondu à la question d'Alex? D'ailleurs, on fera un petit tour de table, parce qu'on aimerait bien savoir aussi qui vous êtes et d'où vous venez.


QN : Totalement ! Et du coup, je suis mécanicien de char dans l'armée et plutôt thriller noir.

NH : Qu'est-ce que vous appelez thriller noir ?


QN : Par exemple, Mattias Köpping. Quand il y a de la violence, de la torture...

NH : D'accord. Qui veut prendre la suite ? Au hasard, Marie?

Marie : Je suis d’Isère, je n'étais que thriller il y a peu et maintenant, j'essaie d'ouvrir mes horizons, mais sans aller jusqu'à la romance. Côté thriller, je suis axé psychologique et là, je vais commencer Les éveillés. La quatrième de couverture m'intrigue très fortement !

JC : il y a une dimension fantastique. Il faut garder ça à l'esprit.

NH : C'est ça. En fait, on va dire qu'on s'est amusé avec un thème. Mais par contre, le fait qu'on se soit basé sur une maladie neurologique existante et mortelle rend le roman un peu dur. Mais on s'est arrangés pour donner à l’histoire trois niveaux de lecture. Un côté fantastique, un côté scientifique et un côté historique.


Marie : Il m'intrigue d'autant plus. Sinon j'ai lu le premier tome de W3, et Nos âmes au diable. Et lui, ça a été un gros coup de cœur. D'ailleurs, il devrait plaire à Alex.

NH : On s'est beaucoup amusé sur celui-là. Peut-être que sur le premier tiers, il va se dire "Oh, où est-ce qu'ils veulent en venir? je l'ai déjà lu..." Mais il faut nous faire confiance.


Franck : De mon côté, je vous ai découvert il y a très longtemps avec Prédation. Et je me souviens, c'était au festival sans nom de Mulhouse, quand il était encore dans la petite salle sous la mairie, et vous m'aviez disputé parce que je vous avais demandé si Kurtz était inspiré du personnage de Marlon Brando dans Apocalypse Now et que je vous avais dit que je n'avais pas vu le film.

JC : On avait fait ça?

Franck : Oui et du coup, je me souviens de l'avoir acheté et vu en sortant du festival.

NH : Et il vous a plu?

Franck : Beaucoup. Même si c'est un film lourd et dense, que j'ai vu en deux fois, Marlon Brando est juste incroyable dedans.

NH : C'est sûr. On ne le voit pas beaucoup au final, mais c'est vrai qu'il est fascinant. Et du coup, il ne reste plus qu'Emilie et Noemi. Qui en premier, Emilie?


Emilie : Je suis photographe et je vous ai découvert avec Nos âmes au diable que j'ai adoré parce que je n’ai pas vu venir cette fin et que je me suis fait balader d’a à z. C'était un bonheur de tourner les pages.

NH : C'est vrai que c'est un bonheur de tourner les pages d'un livre. C'est en train de m'arriver en ce moment avec une série de livres dont je connais pourtant l'histoire parce qu'on regarde l'adaptation sur Amazon Prime. C'est The expanse, un space opéra. J'ai tellement aimé la série que j'ai commencé la série de livres. Donc maintenant, ça me fait d'autant plus plaisir quand un lecteur nous dit qu'il a adoré un de nos romans parce que ça veut dire qu'on a plutôt bien travaillé.

Emilie : C'est vrai que c'est un bonheur parce qu'en plus, ce ne sont pas tous les livres qui font cet effet-là donc franchement, c'est un aspect de la lecture que j'adore. Cet aspect d'avoir envie de tout lire d'un coup.

JC : C'est le plus grand des plaisirs de la lecture, je crois. N'avoir que cette envie de retourner dans la lecture après une journée de travail, d'être embarqué dans une histoire et d'oublier le reste. Et je crois que c'est pour ça qu'on aime autant essayer d'écrire des histoires bien ficelées, c'est pour générer cette envie-là. J'ai des souvenirs de lecture de quand j'étais plus jeune qui m'ont laissé des traces beaucoup plus prégnantes que ce que peuvent me laisser des films ou des séries. Voir même la vie, des fois. Vous avez des personnages de romans qui vous restent en tête et qui continuent leur voyage bien après la dernière page. Et je trouve que c'est beaucoup plus rare avec les films.


NH : Et du coup, il ne reste que Noemi.

Noemi : Une Suisse qui vous a découvert avec Nos âmes au diable que je vous ai pris à Mulhouse parce que beaucoup de mes amies chroniqueuses avaient publié un commentaire dessus. Et du coup, je l'ai lu dans la foulée, et comme on disait, les pages se tournent toutes seules et il rassemble tout ce que j'aime lire dans un roman. Jusqu'à la fin, j'ai été tenu par le suspense et c'est vraiment tout ce que j'aime.

NH : Le thème de ce livre est assez fort.

JC : Bon donc on est tous en bonne compagnie ce soir !

Noemi : Je trouve toujours ça délicat de dire que j'ai adoré un livre comme ça, dont les thèmes sont assez durs mais, au Quartier Noir, on aime tout ce qui noir.

NH : Après, il n'y a effectivement pas de torture, mais je trouve que la violence psychologique, des fois, elle est plus... Je me souviens un jour d'une discussion avec Maud Tabachnik, une écrivaine de polar qu'on adore. Et on discutait justement des scènes compliquées à écrire dans un livre et elle donnait un exemple qui m'avait frappé. Elle racontait une scène de torture avec un homme enfermé dans une cellule. Son tortionnaire arrive et lui dit que, voilà, il va lui couper les deux pieds ou les deux mains. Et que c'est à lui de choisir. Et à ce moment, il y a deux façons de raconter la scène. Soit on projette le lecteur dans la tête du tortionnaire et on raconte la façon qu'on a de scier les os, de cautériser les plaies et de voir sa victime se débrouiller sans mains ou sans pieds. Ou alors, on projette le lecteur dans la tête de la victime et on essaie de le faire se questionner sur la décision qu'on aurait prise à sa place. Est-ce qu'on aurait choisi les mains ou les pieds ? Et elle racontait que le plus impressionnant pour un lecteur, c'était, à son sens, d'imaginer ce qu'on allait dire à cet homme qui arrive pour nous couper deux membres.

JC : Dans nos livres, on a des scènes assez violentes. Dans Les éveillés par exemple, il y en a quelques-unes. Mais en règle générale, les scènes violentes, quand on les écrit, c'est qu'elles sont nécessaires à l'histoire et à la compréhension du personnage.

NH : En réalité, il faut savoir que c'est extrêmement dur d'écrire des scènes pareilles. Même psychologiquement. Pour un auteur, homme ou femme, écrire une scène de viol, c'est horrible. Pour ceux qui ont lu W3, il y a deux scènes de viol au début de l'histoire, qui sont épouvantables, mais sans lesquelles on n’aurait pas compris le parcours psychologique des personnages et certaines de leurs réactions à la fin du roman. Voilà. Après, ça reste notre point de vue, vu qu'Alex parlait du très noir. Et plus j'y réfléchis, plus je me dis que Les éveillés, c'est notre livre le plus horrible.


Marie : Mais ces scènes-là, c'est que des scènes de viols ou de tortures?

NH : Ce n’est pas vraiment des scènes de viol. Ce sont surtout des meurtres plutôt violents. Il n’y en a pas beaucoup, mais c'est assez lié au fait que notre méchant, dans celui-ci est un de nos rares tueurs en série. Il n'y en a pas beaucoup parce qu'on a travaillé pendant sept ans sur un autre projet lié aux tueurs en série et on ne voulait pas en reparler encore. Mais là, on s'est inspiré du mode opératoire de Francis Heaulme. Ce qui était intéressant chez lui, et je parle vraiment de l'aspect psychologique, c'est qu'il pouvait tuer n'importe qui, n'importe quand, n'importe comment. Souvent, les tueurs en série ont un profil de victimes et un mode opératoire. Et dans un sens, ça nous rassure parce que si le tueur en série de notre quartier tue en suivant un profil et qu’on n’y correspond pas, on est plus en sécurité. Or, avec Heaulme et de fait dans Les éveillés, tout le monde risque quelque chose. Parce que le tueur est impulsif et sans schéma type.

JC : C'est d'ailleurs pour ça qu'il a été tellement compliqué à attraper, parce qu'il était imprévisible. La seule chose qui a permis de le coincer, c'est qu'il a fait une erreur. Et la vraie question que je me pose, c'est combien de Francis Heaulme y-a-t-il autour de nous ? C'est vraiment la question qui me revient souvent.


Noemi : C'est vrai que c'est assez frappant quand ce sont des personnages de monsieur-tout-le-monde qui sont des psychopathes. On va finir par me détester à force que je revienne à la charge avec ce livre, mais je ne peux pas m'empêcher de penser au Tueur intime de Claire Favan où on est vraiment dans la tête du psychopathe dès le début, tout en réalisant que ce personnage est un caméléon qui s'adapte à chaque situation dans laquelle il se trouve. C'est ça qui est effrayant dans ce type de personnage. Exactement ce que dit Jérôme. Si ça se trouve, on en est entouré et on ne s’en rends même pas compte.

NH : Il n'y a que dans les films de tueurs en série que les tueurs en série ont des têtes de tueurs en série. Francis Heaulme avait la tête d’un homme qui n'a pas eu de chance dans la vie. Et ça amène à un autre problème d'écrivain qui est de recommencer le travail sur soi chaque fois qu'on se met à la place d'une victime, d'un parent de victime, d'un assassin... On est rempli de clichés qu'on s'approprie de séries ou de films, alors que la réalité est beaucoup plus compliquée que ça.


QN : Et justement, comment vous vous organisez pour écrire ces scènes de torture. Vous avez l'idée et ensuite pendant la rédaction vous y mettez l'émotion. C'est un travail conjoint à vous deux mais, qui écrit et qui suggère ? Est-ce que ça arrive que l'un dise que c'est trop, ou au contraire pas assez ?

JC : Une fois qu'on commence à écrire, on ne discute plus beaucoup. On réécrit juste sur l'autre. Le texte est commun, mais l'un de nous deux commence à écrire et à un moment, l'autre reprend la suite comme si le texte était le sien. Le côté magique du truc, c'est qu'on a une confiance absolue l'un dans l'autre qui nous permet de ne jamais nous prendre la tête sur le résultat. C'est-à-dire que toute modification ou suppression, même de lignes narratives complètes, c'est toujours pour le bien de l'œuvre. Pour que ce soit le mieux possible. Tant dans la narration, que dans le machiavélisme.

NH : Comme disait Jérôme tout à l'heure, on est en train d'écrire le seizième donc c'est presque naturel maintenant. Mais, par contre, ça n'a pas toujours été le cas. Mais aujourd'hui, on est très complices et amoureux depuis plus de 18 ans, on est 24h sur 24 ensemble. Même si cette complicité est arrivée quasiment immédiatement. On s'est vu quatre heures dans un café, on savait qu'on ne se quitterait plus. Il y a des rencontres comme ça, et nous, on a été extrêmement chanceux. Ces rencontres qui fonctionnent, elles s’expliquent par leur complémentarité et ressemblance. Et vraiment, nous, la chance qu'on a eu, c'est qu'on réussit à se compléter autant qu'à se ressembler. Si je schématise au maximum, il y a deux types d'auteurs. Ceux qui pensent la scène avant d'être devant l'ordi et qui ont généralement un très bon premier jet et il y a les auteurs "couches d'oignons" qui construisent en écrivant. Et qui écrivent, et réécrivent, et réécrivent encore. Dans notre duo, on a ces deux types qui cohabitent. Donc tout est simple. Une fois qu'on a la thématique, par exemple l'histoire d'un groupe de personnes qui vont prendre l'île d'Oléron et dire que, maintenant, ce n'est plus la France, c'est Islanova. Une fois qu'on a cette idée de base, on se pose ensemble devant un café ou on part se balader sur la plage et on invente nos personnages. Ensuite, on pose les bases de notre histoire et une fois que ces fondations-là sont posées, Jérôme se lance. C'est quasiment toujours lui qui démarre l'écriture. Une fois, on a essayé d'écrire un chapitre chacun et ça ne fonctionnait pas. Pas à cause du style, mais parce que ça ne collait pas et c'était une catastrophe. On avait un personnage qui évoluait sur dix chapitres qui durent quinze jours, et un autre pour qui les dix chapitres durent trois heures. C'était impossible à monter. Chacun avait son histoire et on s'est retrouvé dans le salon, avec nos titres de chapitres découpés à essayer de donner un sens à tout ça. Finalement, il a fallu tout réécrire. Maintenant, Jérôme commence, quand il a avancé, je relis et je reprends la suite, et ainsi de suite jusqu'à la fin. Et d'ailleurs, parfois, il se peut que l'écriture nous confronte à la réalité du roman. On peut avoir fantasmé un début qu'on trouvait très bien, mais se rendre compte au fil de l'écriture que ça ne fonctionne pas du tout et on recommence.


QN : Vous écrivez vraiment comme un cadavre exquis, dans le sens ou l'un de vous écrit une scène et l'autre écrit la suite.

NH : Après les scènes, ce n’est pas compliqué. Jérôme écrit vraiment le premier jet et ce que je récupère peut devenir plein de choses. Je peux le compléter, le découper, le réduire. Par exemple, les scènes de viols de W3, qui étaient simplement en filigranes, c'est mon imaginaire, car Jérôme ne voulait pas du tout écrire ça. Quand on écrit en duo, il faut aussi se dire que, forcément, pour certaines scènes, l'un sera plus doué que l'autre. Par exemple, les scènes militaires avec des gros fusils, Jérôme sera plus apte à les écrire que moi.

JC : C'est bien réducteur tout ça ! (rires) En fait, c'est surtout que j'ai un passé militaire donc raconter comment on nettoie des armes et comment ça se passe dans un groupe de soldats, j'ai forcément plus d'expérience.

NH : De la même façon qu'un même personnage peut être plus entre les mains de l'un ou de l'autre par rapport au moment dans le livre. Dans W3 par exemple, quand Ilya Kalinine égorge un personnage, c'est Jérôme. Alors que quand il est plutôt dans une phase mystérieuse et séductrice, c'est plutôt moi. Mais pas forcément. Pareil pour Kurtz dans Prédation. Quand il est en position de force, c'est plutôt Jérôme, et quand il est en position de faiblesse, c'est plutôt moi. Quasiment tous nos personnages ont notre double identité même s’ils tirent forcément plus du côté "camughien" ou "huguien".


QN : Quand vous commencez à écrire ensemble après avoir défini votre trame, du fait de vos deux matières de fonctionnement, vous tirez plus du côté planification ou écriture au feeling ?

JC : Sur notre seizième roman, on est à plus de 350 pages d'écrits, et on n’a toujours pas la fin. On ne sait pas exactement comment ça va se finir. Finalement, au fil des différentes écritures, on s'est rendu compte que ça ne servait à rien d'aller trop loin dans un plan parce que tout peut changer selon les personnages. Au début, on le faisait, notamment pendant l'écriture de Prédation.

NH : Et on finissait souvent par changer quand même en cours de route. Ce qui fait que finalement, on perd plus de temps à recoller les morceaux.

JC : Et puis notre avantage, c'est qu'on est deux. Donc on sait qu'on finira toujours par rebondir. On a rarement été bloqué parce que de nos discussions pendant un blocage finit toujours par surgir une solution. Je le vois en discutant avec des amis auteurs. Nous, par rapport à eux, ce blocage dure beaucoup moins longtemps. Mais ça ne veut pas dire qu'on écrit beaucoup plus rapidement. Non, on met à peu près le même temps à arriver au bout de l'écriture.

NH : Exemple emblématique que j'aime citer. On arrive à la fin du tome deux de W3. On est très content de la fin, on ouvre une bouteille pour fêter ça et j'entends un truc à la radio qui amène une révélation, je regarde Jérôme et je lui dis qu'on s'est complètement planté. C'était prévu dès le départ comme ça, mais pour moi, il ne fallait plus que ça se termine comme ça. Et je lui ai dit "Jérôme, il faut jeter les 50 dernières pages..." et il n’était pas trop content.

JC : Je n'étais pas content parce qu'elle m'avait déjà fait le coup avec le début du premier tome.

NH : Toujours dans W3, les attentats de Charlie Hebdo 2015 ont énormément influencé la fin. Mais ils ont aussi beaucoup joué dans la création du personnage de Morgan d'Islanova et de Et le mal viendra. L'actualité, de même que certaines rencontres, peut complètement changer le cours d'un roman. Sans les attentats du Bataclan, Morgan Scali n'aurait jamais existé. Mais en même temps, l'actualité peut aussi affecter dans l'autre sens. Je me souviens quand Charlie Hebdo a été attaqué, je suis resté plusieurs jours sans parler parce qu'à ce moment-là, il y avait la mise sous presse du tome deux qui racontait exactement la même chose. C'était très perturbant.


QN : Et comment avez-vous fait, du coup, pour écrire le dernier ?

NH : La difficulté, dans Nos âmes au diable, ça a été d'être toujours du même point de vue et de trouver l'équilibre pour vous donner toutes les clés de l'enquête mais sans en faire une enquête policière. On a pris énormément de temps pour savoir comment on allait raconter l'histoire. Pour ceux qui l'ont lu, vous savez que le roman commence comme l'enlèvement d'une fillette, mais en réalité, c'était pas du tout l'histoire qu'on voulait raconter. Simplement, on a commencé comme ça, parce que c'était le meilleur moyen de vous embarquer dans un livre, tout en finissant par vous donner l'impression que vous lisiez un autre livre totalement différent. Mais on n’a pas décidé tout de suite de raconter l'histoire comme ça.

JC : En réalité, ça a pris du temps parce qu'il fallait trouver un moyen pour que le lecteur entre en empathie avec cette histoire. Maintenant, on peut l'analyser comme ça. Alors qu'elle traite d'un sujet pour lequel, normalement, on n’en a pas, où on ressent davantage de rejet. Et pourtant, il fallait parce que nous, on a une envie profonde d'écrire, mais on a également le besoin d'être lu. Quand on est devant notre ordinateur, en train d'écrire, on ne pense pas individuellement au lecteur, mais on sait qu'il est là et qu'il faut, du coup, qu'il ait envie de venir et de nous rejoindre.

NH : On est libre dans les thématiques qu'on choisit, mais on essaye quand même de faire plaisir à nos lecteurs. Et c'est ce que je disais au début de la visio, quand on a écrit Islanova et Et le mal viendra, on a pris, à nos yeux, le plus gros risque de notre carrière parce qu'on a osé parlé d'écologie, de réchauffement climatique et d'éco-terrorisme. On s'est d'autant pris un choc que c'est deux de nos livres les plus récompensés, ce sont ceux qui ont le moins bien marché, et Et le mal viendra est sorti pendant le confinement. Le titre vis à vis de la situation a paru très prémonitoire et personne n'a eu envie de l'acheter. Mais nous, en les écrivant, on a eu l'impression d'écrire les livres de notre vie de citoyen.


QN : Par rapport à la région où vous vivez ?

NH : Exactement. Parce qu'on vit au bord de la mer sur une île et on voit tous les jours les dégâts de l'homme et de la nature. On voit les dégâts de l'érosion côtière et les dauphins échoués.. On voit notre île s'enfoncer dans l'eau et tout ça, ça a rendu cette écriture très importante pour nous. Et parfois, ça ne suffit pas à rencontrer le public. Il est plus facile de conquérir le public avec des romans comme Nos âmes au diable qu'avec un livre comme Islanova. Mais ce n’est pas pour autant que c'est ce semi-échec qui nous a poussés à écrire Nos âmes au diable. La genèse de ce roman vient d'un reportage qu'on a vu, et malheureusement, je ne peux pas vous dire lequel sinon ça gâcherait un peu l'intrigue. Mais on était devant et on s'est dit que c'était un thème qui n'avait jamais été abordé, qui est hyper casse-gueule et on s'est dit qu'on allait essayer.

JC : D'ailleurs le dernier, celui qu'on est en train d'écrire, on s'est dit "tient, si on essayait de se casser la gueule une nouvelle fois !" (rires).

NH : C’est exactement ça. On se dit qu’on est encore en train de partir dans une histoire qui nous plaît énormément, avec un personnage qu’on adore, mais pour lequel on n’est pas sûr qu’il sera le style de livre ultra populaire. Dans le sens où il ne sera probablement pas super grand public.


QN : un livre qui ne rentrera pas dans des cases.

NH : c’est ça. Il ne rentrera pas dans les cases d’enquête de police avec gentil et méchant. Il y aura des twists et des surprises sympas. Et dans un sens, je me dis que c’est tant mieux car je pense qu’on ne prendrait pas autant de plaisir à écrire si on n’avait pas notre liberté d’auteurs.

JC : Quand on commence une nouvelle histoire, on a toujours ce moment où on se demande quelle histoire on veut écrire, avec quels personnages. Il y a des milliards de possibilités à inventer et on doit faire un choix là-dedans. Et ce qui nous anime, nous en tant qu’auteurs, c’est de raconter une histoire qui nous fasse nous questionner sur la place de l’Homme dans l’univers. C’est notre principale motivation.


Franck : C’est drôle parce que ça me rappelle une conférence à laquelle j’avais assisté à quai du polar à la sortie de Islanova. Il y avait aussi Jean Bernard Pouy et Olivier Norek et je me souviens d’une partie de cette conférence qui m’avait marqué. A un moment, je ne sais plus exactement qu’est ce qui avait lancé cette discussion, ça avait dérivé sur la question de « pourquoi écrit-on des livres sur la planète qui se dégrade ? » Et Jérôme avait dit cette phrase qui m’a marqué : « Moi, je sais pourquoi j’ai écrit ce livre. Tu n’as pas d’enfant, mais moi si, et je ne peux pas imaginer leur laisser ce monde-là demain. » Et j’ai trouvé que ça résumait parfaitement les livres qui étaient présentés à cette conférence. Parce qu’au final, plus je discute avec mon entourage et plus je me dis que ce n’est même pas ma génération qui a le plus à craindre, parce qu’elle s’en sortira. Mais la suivante, celle des enfants qui naissent aujourd’hui, eux ont beaucoup plus de risques tant géopolitique que climatique. Et j’ai toujours trouvé cette phrase assez forte parce que c’est la problématique. A notre niveau, comment peut-on agir pour permettre une prise de conscience globale.

JC : Finalement, je crois que c’est une phrase que chaque génération peut avoir. Le monde d’aujourd’hui est très dur à lire et c’est de plus en plus difficile de s’y projeter. Il n’y a pas très longtemps, on discutait et on se disait que nous, on a grandi en pleine guerre froide, avec des ogives nucléaires qui étaient braquées de l’ouest vers l’est et inversement. Et des politiques qui étaient prêts à appuyer sur le bouton. Certes, on ne parlait pas encore du réchauffement climatique, mais ces années-là étaient compliquées aussi. Et on n’avait pas de lanceurs d’alerte ni de réseaux sociaux, mais il y avait déjà des gens qui nous disaient de faire attention. Mais la bible nous dit « Croitre, c’est multiplier » alors l’homme croît et se multiplie. Et le gros problème actuel, c’est que justement, on devient de plus en plus nombreux sur une planète dont les ressources sont limitées justement.

NH : Vous savez que la thématique de la soirée, c’est le noir, pas l’écologie… (rires)


QN : Ah non mais c’est intéressant !

JC : ce sont des sujets qui m’animent, et là, je sens de plus en plus le regard de censeur de Nathalie qui me fait « Allez Jérôme, ça suffit, on repart dans le noir ! » (rires)


QN : justement, si on repart dans le noir. Quand vous avez commencé l’écriture de saga comme les voies de l’ombres ou W3, c’était déjà prévu pour en être ou c’était des one-shot qui se sont finalement révélé trop long et qui nécessitait un découpage ?

NH : Pour W3, on savait que ça allait être une saga.

JC : Et aucun de nos livres n’est prévu pour être une grande histoire qu’on allonge pour ensuite la découper et en faire plusieurs romans. Les voies de l'ombre, on ne savait pas où on allait. On savait que ça n’allait pas se terminer en un tome, encore que, ça aurait pu, en y repensant…

NH : Oui, mais la première fin de Prédation, ce n’était pas là même. Par contre W3 était prévu pour être une trilogie. Islanova et Et le mal viendra, pareil. D’ailleurs, ces deux-là ont été construits de manière à se compléter. Vous avez besoin de lire les deux pour avoir tous les éléments de l’histoire.

JC : Et le roman sur lequel on est en train de travailler, on a un personnage qui fait partie d’un duo, même si ce n’est pas encore un duo, qu’on va garder en vie. J’ai déjà prévenu Nathalie que je n’avais pas envie de le tuer parce que j’ai très envie de retravailler avec. Ça ne deviendra pas un personnage récurrent parce qu’on n’a pas envie de partir sur ce type d’histoire. Ça nous ennuierait. On adore créer des personnages alors garder toujours le même ne serait pas stimulant.

NH : Mais les lecteurs adorent les personnages récurrents. On le voit avec le succès des séries TV.

JC : Et tant mieux parce que plein d’auteurs écrivent de très bonnes histoires avec des personnages récurrents. Mais notre John, qui est encore en train de naître, fera l’objet d’un personnage important dans un deuxième et peut-être un troisième roman. Mais rien n’est fait pour l’instant, on n’en a encore même pas parlé avec notre éditeur.


QN : Il a déjà une date de publication, ce seizième roman ?

NH : Normalement, l’année prochaine.


QN : Toujours chez Fleuve ?

NH : Toujours. On est dans une bonne maison dirigée par un homme droit et une super éditrice alors on y reste.


QN : ça a été difficile de rentrer chez Fleuve ? On voit beaucoup d’auteurs mettre beaucoup de temps des fois à entrer dans une maison d’édition…

NH : Ce sont eux qui nous ont suppliés de venir chez eux ! (Rires)


QN : Les Camhug ça a été, du coup, mais Jérôme Camut et Nathalie Hug ?

NH : Il faut demander ça à Jérôme !

JC : Madame, non, parce qu’elle était déjà éditée en duo avec moi. C’est plus compliqué quand c’est vraiment la toute première fois qu’on publie. Ça a été un peu dur de trouver un éditeur pour mon premier roman. C’était le premier tome d’un cycle fantastique qui devait être une trilogie, mais que je n’ai finalement pas pu faire en moins de quatre tomes. Je ne connaissais personne dans l’édition et une fois que j’ai fini d’écrire ce qui allait être le premier roman, je l’ai envoyé à 40 ou 50 éditeurs. Je ne me suis même pas demandé s’il faisait de la littérature de genre puisque je n’ai quasiment envoyé qu’aux éditeurs dont je lisais les livres et je lisais énormément de fantastique et de SF. Je n’ai jamais reçu de lettre de retour comme quoi ils avaient lu mon manuscrit, mais beaucoup de lettres comme quoi je ne correspondais pas à la ligne éditoriale de la maison. Et finalement, c’est venu d’un ami qui connaissait une éditrice qui travaillait à l’époque pour les éditions du Serpent à plume. Et ils ne faisaient pas du tout de fantastique, mais mon ami lui a donné mon manuscrit en me disant, on essaie et on verra bien. Là-dessus, le manuscrit reste pendant des mois sur le bureau, elle ne le lit pas par manque de temps, mais mon ami l’appelle tellement régulièrement qu’elle finit par le ramener chez elle. Rebelote, ça reste en standby pendant des semaines, mais il s’avère que le mari de cette femme, qui me connaissait par des amis communs, un soir d’insomnie, se dit qu’il allait jeter un œil. Et il m’a raconté plus tard qu’il a quasiment passé une nuit blanche dessus et que le lendemain, il a donné le manuscrit à sa femme en lui disant « écoute, si tu ne publies pas ça, tu ne connais pas ton métier. » Donc elle l’a lu, et elle a créé spécialement pour ce livre, une nouvelle collection pour pouvoir publier du fantastique.


QN : Un gros coup de chance en fait.

JC : Gros coup de chance, oui mais, après, forcément qu’il y a des gens bien nés, dans une famille d’élites intellectuelles parisiennes, pour qui c’est plus facile d’avoir des contacts et des réseaux. Mais honnêtement, je pense que tous ceux qui ont un petit ou un gros talent, se font éditer s’ils ont la pugnacité de continuer à attendre et à écrire.

NH : Et aujourd’hui, le monde a beaucoup changé par rapport à nos débuts. Aujourd’hui, quelqu’un qui commence à écrire, s’il arrive à trouver un libraire qui accepte de lire son manuscrit, il pourra aussi le conseiller sur, éventuellement, une personne spécifique à contacter. Voir même contacter directement un commercial. Parce qu’envoyer directement à un éditeur, ça a deux inconvénients. D’abord, ils ont des piles immenses de manuscrits qu’ils reçoivent. Et ensuite, on n’est pas forcément bons dans les premiers chapitres. Le début est le plus compliqué. J’ai déjà lu des manuscrits et, parce que je suis auteur, je vais aller plus loin que les quelques premières pages parce qu’il faut aussi le temps que la machine se mette en route. Sauf que les éditeurs n’ont pas le temps. De notre côté, on l’a vu avec Prédation. Il fait partie de nos plus gros succès, mais le simple fait d’avoir été lu par un lecteur lambda et il avait été refusé chez fleuve. Et quand notre éditrice s’est rendu compte qu’elle l’avait refusé, c’était devenu notre éditrice chez Calmann Lévy, et elle s’est demandé comment elle était passé à côté de ce livre. ça tient à peu de choses. La personne est dans un mauvais jour ou un peu fatiguée et on passe à côté de livres qui peuvent être de gros succès… Il y a juste à regarder Harry Potter. Il a été refusé et pourtant, maintenant, c’est un succès planétaire.

JC : je n’aimerais pas être l’éditeur qui a refusé Harry Potter quand même…

NH : C’est sûr. D’autant plus que maintenant, ce qui rend les choses compliquées, ce sont les réseaux de distribution parallèle. Les auteurs qui publient directement sur internet, et l’intelligence artificielle qui arrive.


QN : Vous vous êtes déjà amusé avec ?

NH : Je l’utilise un peu pour les recherches et honnêtement, c’est surprenant. Il est capable d’écrire des dialogues certes convenus et sans la touche humaine, mais il faudra voir dans cinq ans. C’est déjà impressionnant et ça peut évoluer très vite, une fois qu’on l’aura nourri de tout ce qu’on pourra lui donner. Il y a déjà des auteurs qui revendiquent sur leur livre « co-écrit avec ChatGPT ». Il y a cette capacité à donner un chapitre complet, du moment qu’on lui demande des choses suffisamment précises, qui est absolument impressionnante.

JC : Après, on parle de nous, mais je pense que déjà, tout ce qui est métier indispensable, comme le social par exemple, ça ne sera jamais remplacé par des robots. Et quand on voit les enfants commencer à écrire des dissertations avec ça, c’est un peu compliqué. Parce qu’il faudrait au contraire, leur apprendre la nécessité de se poser, de réfléchir…


Florence : Mon fils combine le fait de ne pas aimer le français à celui d’être fasciné par l’informatique et les intelligences artificielles. Alors s’il trouve une dimension ludique à ça, c’est une sorte de compensation.

NH : Après, j’ai lu dernièrement qu’un nouveau métier émergeait qui consistait à apprendre à questionner les IA.

JC : A mon avis, ça ne durera pas longtemps, vu la faculté de ces logiciels à apprendre extrêmement vite.

NH : La dernière fois, pendant que Jérôme avançait sur notre roman, j’avançais un peu sur le mien de mon côté qui se passe en Ecosse. Et forcément, c’est cliché, mais en Ecosse, on boit du whisky. J’ai demandé à ChatGPT quel whisky pouvait évoquer la terre et la mer et il m’a sorti des réponses ultra précises. Je lui ai aussi demandé d’écrire des poèmes pour une amie, des dialogues… Et c’est sûr que ce ne sont pas du tout les dialogues que moi j’écrirais. Mais il est capable de les faire.

JC : Je suis en train de repenser au fait que des adolescents n’aiment pas le français. Personnellement, j’étais dans le privé catholique et je me rappelle d’une femme sans âge qui s’escrimait sur la sexualité présentée par Baudelaire dans Les fleurs du mal. Alors que ça n’a plus rien à voir avec celle présentée maintenant. On se plaint que les jeunes perdent goût à la lecture mais c’est sûr qu’avoir envie de leur donner goût à ça en les forçant à lire du Racine, ce n’est peut-être pas la meilleure solution.


Franck : J’ai eu cette discussion encore récemment, sur les livres qu’on étudiait en cours. Et on se faisait la remarque que génération après génération, c’étaient beaucoup les mêmes titres qui ressortent. Comme si, pour l’éducation, passé une certaine date, plus rien n’avait été écrit.

NH : Il y a des enseignants qui commencent à se battre. De notre côté, on a fait quelques interventions dans des collèges et on a rencontré des jeunes qui avaient repris goût à la lecture grâce à Prédation et Islanova par exemple.

JC : Et il y a encore autre chose que j’ai découverte il n’y pas si longtemps, c’est qu’on fait aussi lire des versions condensées des classiques.


Franck : Et des versions corrigées pour ne plus choquer. On ne peut plus dire des mots comme nains, noirs…

NH : Après l’objectif est d’arracher nos enfants de 10/15 ans aux écrans et c’est là qu’on voit que le monde ne tourne pas rond. C’est sûr qu’on vit dans un monde où les ados de 15 ans vivent dans la trouille, avec des risques d’attentats, des crises climatiques, des confinements covid… Et après, vous voulez les forcer à lire Racine. Rien d’étonnant à ce qu’ils aillent sur TikTok.


Noemi : Après, personnellement, je ne vais pas critiquer TikTok, dans ma librairie, je vois énormément de jeunes qui se mettent à lire des livres qu’ils ont vus passer sur ces réseaux. Alors c’est beaucoup de romance, mais ça, j’en lis aussi de temps en temps donc je ne critique pas.

NH : Oui et il y a plusieurs niveaux de romance. Par exemple, je suis fan des grandes histoires d’amour épique à l’anglaise façon Emily Brönte, ou plus locales avec Régine Deforge. Maintenant, ce qu’on appelle romance, c’est beaucoup plus des histoires de jeunes adultes, bourrées de Bad boys. Il y a des histoires de feel good, qui, elles, font du bien au moral et sont comme un petit bonbon à Noël. Et puis il y a les grandes romances historiques, les fresques épiques à la Docteur Jivago. Et dans tous nos romans, on arrive à mettre une petite histoire d’amour, même contrariée. Parce que ça fait partie de la vie. Et les romans doivent y ressembler un peu sinon ça ne marche pas.


QN : Vous êtes de grands lecteurs ou pas ?

NH : Je suis une grande lectrice surtout le weekend. Et en ce moment, comme je le disais tout à l’heure, je suis dans The expanse, qui est absolument génial. Et je lis par petit bout un roman graphique très dense qui s’appelle Moi ce que j’aime, c’est les monstres.

JC : De mon côté, je lis beaucoup de documents. Quand je suis en écriture, je lis très peu de romans. Souvent des essais et des documents pour les romans. Là, pour le dernier, ça ne servira peut-être pas, mais je lis un livre sur la place de l’école dans la société. Qui décrit en fait, la vision qu’on a de l’enseignement en Allemagne, en France et ailleurs. Ce sont des sujets intéressants parce que ça permet de voir que des fois, ce n’est pas terrible. Dans certaines, comme en France, ce sont des lieux fermés, goudronnés, presque semblables, dans l’idée, à des prisons. Tandis que dans d’autres, comme les pays nordiques, ils sont dehors. Et c’est très instructif comme lecture.


QN : Et côté adaptations, avez-vous déjà eu des touches ou pas ?

NH : Joker ! J On adore les séries télé !

JC : Après, moi, quand je dis que j’aime les séries, c’est HBO. Si ça ne tenait qu’à moi, je ne ferais que BBC et HBO.


Franck : HBO est très fort dans tout ce qui font. Déjà avec Tchernobyl l’année passée. Et rien que la dernière, The last of us, est incroyable. Ils ont réussi à faire la meilleure adaptation possible d’un jeu vidéo.

JC : En film, je ne sais plus si c’est un jeu vidéo, mais on a adoré World War Z. Qui était un sujet un peu casse-gueule, mais qui est bien écrit, bien joué, intelligemment tourné.


Franck : C’est un livre de Max Brooks et, dans ce cas, il ne faut pas le lire. Parce qu’il est à des kilomètres de son adaptation. Le film en lui-même est bien, mais faut oublier complètement le livre. Quand j’ai vu le film je venais de finir le livre, et ce n’est pas passé, pour moi.

JC : J’ai vécu la même chose avec La route. Je suis un fan absolu du livre, qui a une puissance incroyable, mais le reste, malgré l’argent et l’implication, ce n’était pas aussi bien. Des bons romans, il y en a plein. C’est un travail solitaire donc pour peu qu’on prenne le temps d’avoir des personnages singuliers et une intrigue bien ficelée, ça marchera. Un film, ou une série, c’est collectif. Et quand ça tombe que tout le monde est d’accord, c’est un miracle. Il y a tellement de gens impliqués qui veulent mettre leur grain de sel que c’est très très compliqué.


QN : C’est quoi, pour vous, la meilleure adaptation d’un livre en film ?

JC : Le seigneur des anneaux. C’est phénoménal ce que Peter Jackson a réussi à faire, j’étais assez content quand je les ai vus. Après, j’ai lu le livre dans de super conditions. Sous la neige, pendant mon service militaire, dans ma tente… Les meilleures possibles. Mais c’est vrai que le livre est différent, beaucoup plus lent.

NH : Game of throne aussi, je crois que ce n’est plutôt pas trop mal adapté.


Marie : Pour moi, c’est clairement La ligne verte, la meilleure adaptation au monde.

JC : C’est le roman qu’on m’a volé. J’aurais adoré écrire ce livre.

Franck : La ligne verte, c’est le seul film que je regarde quand je veux pleurer. Je ne peux pas ne pas pleurer devant ce film.


QN : Et sur ces bonnes paroles, on arrive au bout. Mine de rien, ça va faire presque deux heures. Un petit dernier mot ?

JC : C’est la première fois qu’on faisait ça et j’appréhendais un peu en me disant que c’était comme si j’allais au café d’à côté, rencontrer de nouvelles personnes. Je me suis demandé ce qu’on allait bien pouvoir se raconter et finalement, arrivé maintenant, c’est comme une longue conversation et ça a été un moment très sympa.


QN : Côté actualité, on peut vous retrouver où prochainement ?

NH : On n’a pas beaucoup de salons de prévu. Mais on sera à Iris Noir, à Bruxelles, les 22 et 23 avril, à Narbonne en mai. Mais comme on est en pleine période d’écriture, on a très peu de choses de prévu.


QN : Au plaisir de vous croiser en salon donc ! C’était très sympa.

JC : Vous avez tout l’air d’être des gens fort sympathiques alors surtout, prenez soin de vous.

NH : Et merci d’être toujours passionnés, de soutenir les auteurs et la littérature noire. Sans vous, on n’existe pas.

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